Découvrez le projet Tamata Ocean initié par Romain Tourte à bord de l’Arpège Oanig, basé à La Rochelle…..ou comment rendre un voilier autonome.
« Arpège de 1972 à donner avant destruction », nous sommes le 9 septembre 2014 lorsque mes yeux croisent cet article sur le site de l’Association des Passionnés d’Arpège. A ce moment là, je reviens d’une traversée entre la Corogne et les Açores avec un vieux pirate Normand. Avec lui, j’ai découvert le plaisir d’être en mer, de ne voir que cet horizon bleu à perte de vue, de parler des histoires de mer, de bateau et des aventures qui les accompagnent. Je n’avais pas prétention à devenir marin. Nomade dans le cœur, j’avais déjà parcouru quelques bout de terre avec mon sac sur le dos. En ce jour de septembre, le chemin m’amenait sur la voie des mers. Alors j’ai pris la balle au bond et me suis présenté à Dielette où le bateau attendait depuis trois ans pour retrouver son élément. J’ai rencontré Hervé & Isabelle qui se séparaient de leur bateau, l’idée leur a plu, nous nous sommes serrés la main, le bateau était à moi. Deux mois plus tard, je posais mon sac à dos et commençais les travaux de restauration.
Il me faudra en tout un an pour refaire la coque, le pont, changer le gréement, réviser le mât, sortir le moteur et découvrir la mécanique. J’apprends sur le tas, accompagné par des gens du coin qui apprécient le petit jeune qui retape ce bateau. J’avance doucement mais sûrement pour rendre ses lignes et ses couleurs. Enfin, le 17 octobre 2015 Oanig retrouve son élément.
Aujourd’hui il est ponton B à Dielette et a commencé à naviguer sur le terrain de jeu des Anglos Normandes, excellent endroit pour apprendre si on en croit les gens du coin… et pour sûre nous avons appris lui et moi, entre Sark, Guernesey, Aurigny et le Raz Blanchard, nous avons frayé avec le courant, dû rebrousser chemin, eut quelques sueurs froides et découvert aux passages quelques merveilles de mouillage serein. L’été dernier a aussi été l’occasion de mettre en place les principes du 0 déchets, d’équiper le bateau de contenants amovibles pour s’avitailler en vrac, d’apprendre à brasser de la bière ou encore cuisiner avec un ami chef cuisto des conserves, patés et tout ce qui fait le régale des papilles en mer. Pour valider le concept, nous nous sommes inscrits sur le tour des ports de la Manche avec un résultat au delà de nos espérances, 6 jours, 4 personnes, 3 kg d’épluchures et de belles manches jouées avec les copains sur l’eau. En définitive défis relevé outre 3L de gasoil, 4 pansements et l’emballage du beurre… le reste était compostable ou réutilisable.
L’initiative s’appelle Tamata Ocean en hommage à Bernard Moitessier pour l’ardeur qu’il véhiculait, ses livres, ses voyages et ses convictions. L’idée est simple : développer des solutions Open Source afin de gagner en autonomie sur la mer, et ce de manière éco-responsable. Tout le challenge consiste à trouver la recette d’un cocktail de technologies afin de voyager avec, les tester, valider et les promouvoir par la rencontre et l’accueil à bord. C’est un petit bateau mais il en a dans le ventre, et avec quelques idées détonantes, il pourrait constituer une alternative répondant aux problématiques de demain. L’idée est de travailler sur différents pôles (Eau, Nourriture, Energie, Santé, Savoir) et d’intégrer des solutions correspondantes à bord. Par exemple, la partie 0 déchet se verra bientôt complétée d’un Lombricomposteur, d’un micro potager et d’autres idées reproductibles par tout à chacun.
L’histoire ne fait que commencer, nous avons survécu à la première saison d’apprentissage, le bateau file et j’ai pu défricher quelques peu notre terrain de jeu. L’année prochaine sera sous le signe de navigations plus ambitieuses et de sorties ludiques autours des principes d’autonomie. Alors si je suis tombé sur cet Arpège, ce n’est sans doute pas un hasard, en musique, c’est l’ensemble des notes qui forment une harmonie… La partition est à écrire et pour l’heure il semble que nous ayons tous une note à jouer.
En attendant de faire votre connaissance, je vous souhaite de tout cœur, bon vent et belle mer.
Romain – Octobre 2016